Code pénal - Article 314-1 : Commet un abus de confiance la personne qui détourne, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé.
L'abus de confiance est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende.
Définition
Sommaire
1. Remise préalable
1.1 Nature de la remise
1.2 Objet de la remise
2. Éléments constitutifs
2.1 Élément matériel
2.2 Élément moral
3. Répression
3.1 Procédure
3.2 Peines
1. Remise préalable
1.1 Nature de la remise
Le bien objet de détournement dans l'abus de confiance doit avoir été préalablement remis
Cette "remise" doit être volontaire et précaire (à charge pour celui qui reçoit de restituer le bien, de le représenter ou d'en faire un usage déterminé).
Le code pénal ancien énumérait une liste limitative de contrats en vertu desquels la remise devait avoir eu lieu (louage, dépôt, mandat, travail salarié ou non…). Les juges devaient alors nécessairement caractériser l'existence préalable de l'un de ces contrats pour pouvoir envisager la qualification d'abus de confiance dans l'hypothèse d'un détournement. Le code de 1994 a supprimé cette exigence.
Enfin la remise du bien pourra avoir été faite par l'intermédiaire d'un tiers (et donc pas par le propriétaire du bien lui-même).
1.2 Objet de la remise
Le texte d'incrimination précise que la remise doit porter sur des fonds, des valeurs ou un bien quelconque. La jurisprudence est plutôt extensive et inclut toutes choses susceptibles d'appropriation.
Il peut s'agir d'un bien corporel ou incorporel dès lors qu'il est susceptible d'appropriation (V. toutefois : Crim. 19 juin 2013, n° 12-83.031, et Crim. 30 juin 2021, n° 20-81.570 B, sur la notion de détournement de son temps de travail par un salarié).
En revanche, services et immeubles sont exclus du champ d'application de l'abus de confiance.
2. Éléments constitutifs
2.1 Élément matériel
L'élément matériel de l'abus de confiance consiste en un détournement de la chose remise à charge de la restituer, de la représenter ou d'en faire un usage déterminé.
Le détournement peut consister en une action ou une omission (ex. boissons non facturées dans un bar). Plus précisément, l'acte de détournement peut consister en un usage abusif ou en un retard, un refus ou une impossibilité de restituer.
L'abus de confiance est un délit instantané : le détournement existe dès lors que le propriétaire de la chose confiée ne peut plus exercer ses droits sur elle (ex. vente d'un bien déjà vendu mais dont le vendeur était resté en possession jusqu'à ce qu'il soit livré, destruction de la chose…).
Il n'est pas nécessaire en revanche que l'auteur de l'infraction se soit approprié la chose à titre personnel ou même qu'il en ait tiré un profit quelconque.
Le « préjudice d'autrui », élément constitutif du délit d'abus de confiance, s'entend d'un préjudice matériel ou moral, actuel ou simplement éventuel. Il peut être subi par le propriétaire ou par tout détenteur ou possesseur du bien détourné. Le profit que pourrait éventuellement réaliser l'auteur de l'infraction est en revanche indifférent.
2.2 Élément moral
Le délit d'abus de confiance, en tant que délit intentionnel, n'existe que si le détournement a été commis avec une intention frauduleuse. Celle-ci suppose la connaissance de la précarité de la possession et la prévisibilité du résultat dommageable de son action. L'auteur doit avoir eu l'intention de se comporter en propriétaire du bien remis. L'appréciation de la mauvaise foi par les juges du fond est souveraine, ce qui conduit à la mise en place d'un système de présomptions de fraude basées sur les circonstances factuelles (faits, qualités de l'intéressé...).
3. Répression
3.1 Procédure
En matière d'abus de confiance, le point de départ de la prescription de l'action publique doit être fixé au jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l'exercice de cette action (V. L. n° 2017-247 du 27 févr. 2017, ayant consacré et généralisé aux infractions occultes les solutions jurisprudentielles antérieures au sein de l' art. 9-1du code de procédure pénale, et instaurant, parallèlement un délai butoir de douze années révolues pour les délits).
La complicité est punissable selon les règles de droit commun.
La tentative d'abus de confiance est également incriminée depuis la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 (C. pén., art. 314-1-1).
L'immunité familiale de l'article 311-12 du code pénal est applicable.
3.2 Peines
3.2.1 Personnes physiques
L'abus de confiance est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 € d'amende.
Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 750 000 € d'amende lorsque l'infraction est commise : en bande organisée; par une personne qui, de manière habituelle, se livre ou prête son concours, même à titre accessoire, à des opérations portant sur les biens des tiers pour le compte desquels elle recouvre des fonds ou des valeurs; par une personne qui fait appel au public afin d'obtenir la remise de fonds ou de valeurs ou au préjudice d'une association qui fait appel au public en vue de la collecte de fonds à des fins d'entraide humanitaire ou sociale; au préjudice d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur.
Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 1 500 000 € d'amende lorsque l'abus de confiance est réalisé par un mandataire de justice ou par un officier public ou ministériel soit dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, soit en raison de sa qualité.
Les personnes physiques encourent également des peines complémentaires (interdiction des droits civiques, civils et de famille, interdiction d'exercer certaines fonctions ou professions, confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit, affichage ou diffusion de la décision prononcée…).
3.2.2 Personnes morales
Les personnes morales encourent, outre l'amende, les peines prévues par l'article 131-39 (dissolution, fermeture, placement sous surveillance judiciaire…).
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